Communication d’innovation, thématique d’avant-garde : la part du contenu

02 juillet 2021
Temps de lecture : 24 minutes

Comment communiquer sur une innovation, sur un sujet d’avant-garde dont le bénéfice est difficilement palpable ?
De manière traditionnelle, la communication érige ses fondations sur sa singularité, ce qui la rend unique et la caractérise.
Il arrive que cette singularité soit avant-gardiste.
D’où ma question légitime : comment arriver à faire prendre conscience d’un besoin dont le bénéfice n’est pas encore conscientisé ?

J’ai donc décidé de croiser les regards. Car édifier un contenu concerne tant une vision stratégique, la rédaction, que le copywriting, le référencement et l’étude du public.

J’ai échangé avec

  • Muriel Gani, experte éditoriale et qui maîtrise l’art d’écrire pour simplifier autant que possible – mais pas plus – la complexité »
  • Stéphane Labartino, fondateur de COMONGO, qui explore les apports de l’analyse de ressentis à travers l’outil en ligne COMONIMAGE
  • Alexandre Leblanc, pour son recul stratégique et sa finesse d’analyse côté SEO, et sa plume inégalable. Alexandre Leblanc se présente lui-même comme un SEO repenti. Il a une vision très stratégique du SEO, avec une analyse très poussée des enjeux.
  • Véronique Souverain, responsable communication de Linksium, qui conseille des entrepreneurs deeptech (innovation de rupture) dans leur communication.
  • Stéphane Truphème, le roi du copywriting et du content marketing

D’où provient mon interrogation ?

J’accompagne une entreprise, Continuum : elle propose des solutions acoustiques pour lutter contre la nuisance sonore.
Ces solutions sont travaillées de manière à permettre un équilibre sonore naturel, bénéfique au mieux-être et à la qualité de vie. Preuve à l’appui : une étude clinique réalisée en 2018.
Le hic, les bienfaits de l’équilibre sonore naturel ne sont pas facilement conscientisés. À titre d’exemple, on se rend compte de la nuisance d’un bruit quand celui-ci stoppe.

La communication d’innovation

L’avant-garde, un concept vaniteux ?

Véronique Souverain, Linksium

 

Pour commencer à explorer le sujet, effectuons un parallèle avec le monde artistique. La notion d’avant-garde s’est arrêtée avec Andy Warhol, lorsqu’il a répété ses tableaux représentant Marilyn Monroe imprimée en différentes couleurs.
En cassant la notion d’un art original, il s’est joué du système de l’art.
Warhol a continué à détricoté le système en affirmant que tout le monde peut prétendre à son quart d’heure de notoriété. Une belle manière de prouver que la vanité de la notoriété, qui ne découlerait pas que du talent, mais qui se construit.
On peut porter le même regard critique sur l’innovation. Contrairement aux légendes, une innovation est rarement le fruit d’un génie isolé dans un garage, mais plutôt le résultat reproductible d’un écosystème d’innovation, tels les portraits de Marilyn reproduits par dizaines.
‘Dash 3 lave plus blanc que blanc’ disait Coluche. Dans cette innovation pointe une forme d’arnaque. L’innovation, l’avant-garde, la modernité sont ont progressivement perdu de leur fraicheur pour devenir sources de revenus.
Dans les années 40, bénéficier d’une machine à laver, c’était très utile.
En revanche, questionnons l’intérêt de passer de Dash 2 à Dash 3.

Avec la société de consommation de masse, l’innovation d’utilité a glissé vers l’innovation de séduction. L’innovation incrémentale s’est peu à peu vidée de sens pour nourrir le narcissisme de l’acheteur. Dans le champ cosmétique « parce que je le vaux bien », dans le champ politique « les promesses n’engagent que ceux qui y croient », le tout avec une bonne dose de cynisme. C’est « l’ère du vide » décrite par le philosophe grenoblois Gilles Lipovetski dès 1983.

Depuis quelques années, Carrefour et autres Danone constatent que les gens ne croient plus en cette innovation de séduction. Le mécanisme huilé des grosses machines marketing s’est dézingué (innovation incrémentale- promesses- TV- calendrier des promos en magasin). Les marques se sont retrouvées démunies avec la vérification systématique sur internet de l’offre de prix et de la « vraie » satisfaction avec des échanges entre consommateurs. Steigler l’a théorisé en parlant de désenchantement du capitalisme.
La possession du nouveau a fait la place à d’autres joies celles de démultiplier son pouvoir « d’usage » avec des achats sur le Boncoin.

Ferréole

En revanche, tu évolues dans un secteur d’innovation de rupture qui apporte de réels progrès bénéfiques à la société.
NB : la structure dans laquelle Véronique intervient accompagne, notamment, des chercheurs à valoriser leurs résultats de recherche pour transférer leurs technologies auprès d’industriels ou créer une entreprise.

Véronique

Je travaille avec des scientifiques et des entrepreneurs qui inventent de nouvelles manières d’utiliser la matière. Il en résulte des technologies appelées « deepetch » qui sont en mesure de radicalement améliorer des procédés industriels.
On peut parler d’innovation à impact, c’est-à-dire l’innovation qui permet de :

  • faire évoluer l’offre des industriels pour se maintenir comme leader sur un sujet d’expertise
  • faire gagner en valeur l’entreprise grâce à des avantages concurrentiels

Les attendus concernent ainsi soit des retombées financières, soit des gains extrafinanciers, c’est-à-dire sociétaux, environnementaux.

La communication d’innovation à impact n’a rien à voir avec la publicité grand public. Il ne s’agit pas de plaire, mais de rendre crédible une innovation technologique tout juste sortie d’un laboratoire de recherche. Cette innovation d’impact se démarque de l’innovation de séduction et s’affranchit de ses codes. C’est tout le contraire du marketing narcissique. La moindre promesse sans fondement réel est contre-productive.
Je reviens sur le mot « impact ».

Il peut aussi y a voir une dimension vertueuse au mot impact quand ces innovations concernent les grands défis actuels : environnement, santé, vivre ensemble. Néanmoins, restons lucides , la technologie joue un rôle de contribution. Depuis que je suis née, on peut « technologiquement » nourrir la planète entière, or depuis que je suis née, des gens meurent de faim. Il y a donc un enjeu de gouvernance et des non-sens systémiques qui ne relèvent pas de la technique.

Une fois ces réserves émises, explorons le contexte de l’innovation

Véronique

Je travaille avec des start-ups dont le principe actif est issu des laboratoires de recherche publique de la région Grenoble Alpes.
Tout l’enjeu est de transformer des idées scientifiques en technologies attractives pour des industriels et des financiers. La phrase est simple, pourtant l’enjeu est complexe.

Les scientifiques vivent dans le flux d’informations que nous partageons tous, relatif aux défis environnementaux et sociétaux : le réchauffement climatique, la protection de la biodiversité, la fragilité de nos démocraties, la difficulté de l’inclusion, etc.
Ces mêmes scientifiques explorent au quotidien les nouvelles fonctionnalités de la matière.

Au croisement des informations sur la course folle de notre monde et des découvertes qu’ils font dans leurs labos, certains scientifiques font émerger de nouvelles solutions, des perspectives révolutionnaires. Tout cela n’est pas lié à une mode, mais à une connaissance approfondie et renouvelée de la matière et de notre environnement.
Ces nouvelles approches peuvent court- circuiter des filières industrielles dominantes, couteuses et polluantes. David secoue sérieusement Goliath, d’où le terme innovation d’impact.

L’innovation de rupture, un bouleversement cognitif

Véronique

L’innovation de rupture est parfois tellement nouvelle qu’elle semble impossible, car elle remet en cause les modèles économiques des acteurs en place.

Prenons l’exemple d’une start-up dont l’invention est née du croisement de la physique et la biologie : cela donne un diagnostic sanguin qui s’appuie sur le magnétisme et non plus sur l’analyse biologique. Le dispositif existant d’analyse sanguine classique fait  la taille d’un camion ;  le dispositif alternatif intégrant l’analyse par magnétisme représente l’encombrement d’un terminal CB.
Du camion au terminal CB, cette compacité du procédé s’accompagne d’une précision plus fine.
Un changement aussi brutal est difficile à admettre.
Une telle rupture avec l’existant suscite du scepticisme, voire du rejet.
Certaines innovations sont tellement incroyables que convaincre les futurs industriels sur leur apport nécessite de procéder par étape.
D’un point de vue cognitif, l’innovation de rupture est difficile à accepter.
Autre chose qui rentre en ligne de compte, les entreprises et les investisseurs prennent leurs décisions avec prudence et se méfient de tous les changements qui pourraient mettre en cause le business existant. Les dirigeants économiques veulent être en capacité de prévoir et conserver leur rentabilité. Leur souhait est un oxymore : innover sans risque.

Industriels et financiers attribuent volontiers des vertus à une innovation radicale si celle-ci leur permet de gagner du terrain sur leurs concurrents ou de devenir leader.
Parfois, comme pour la voiture électrique par exemple, quand les enjeux dépassent ceux du marché, les industriels n’intègrent des innovations que sous la pression de la loi qui les oblige à devenir plus vertueux.
Mais, passé les premiers soubresauts, la fin de l’histoire d’une innovation de rupture peut être glorieuse.
C’est d’ailleurs souvent cette partie flamboyante que l’on retiendra, oubliant hésitations et rejets du début. Pourquoi s’en priver après avoir pris de risques !
Effectivement, une fois adoubée par les premiers acteurs économiques précurseurs, l’innovation de rupture révèle son éclat exceptionnel.
L’innovation de rupture peut alors se muter en légende.
Toutes les caractéristiques qui semblaient abscons deviennent évidentes.
Le scepticisme s’est mu en admiration. Les industriels et investisseurs rejouent en boucle la légende de l’ « innovation géniale » sortie du garage. Le biais de confirmation finit le travail et achève d’assoir le succès et l’acceptation de cette innovation de cette nouvelle technologie issue de la science. Happy end !

Le contenu pour définir l’offre

Muriel Gani

« Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement et les mots pour le dire arrivent aisément” écrivait Nicolas Boileau au XVIIe siècle.
Inversement, la spécificité d’une thématique émergente est le flou qui réside y compris dans l’offre elle-même.

Nous ne sommes pas sur des notions éprouvées, mais en train de formaliser un discours qui conduit à clarifier une offre encore mouvante.
Et le discours permet de définir de plus en plus précisément l’offre : il lui fait gagner en maturité : c’est de la maïeutique et c’est souvent passionnant !

Véronique

La communication d’innovation, qui accompagne l’arrivée d’une nouveauté technologique, doit être très mesurée.
Les responsables de start-ups ont un dilemme à résoudre : être singulier et avoir un écho universel.
Il s’agit d’être singulier, parce que forcément leur technologie est unique.
Mais, la singularité de cette technologie est aussi un écueil ; personne n’en connaît le bénéfice ni ne possède la compétence de comprendre cette singularité.
Suivons notre exemple : peu de monde peut comprendre le bénéfice du magnétisme pour l’analyse d’une goutte de sang.

De la singularité à la croyance

Véronique

D’une réalité scientifique, il s’agit de passer à un discours qui intègre de la croyance, puisqu’on ne peut pas faire un cours de 3h sur le magnétisme.

Notons que dans le champ de l’innovation technologique, lorsque tu vas chercher la singularité, c’est une démarche profondément ancrée dans le réel.
Ce n’est pas une démarche artificielle comme, par exemple, pour une marque de luxe qui souhaite donner du sens à sa personnalité.
Dans la deeptech, cette singularité est compliquée à faire émerger, car elle est incarnée par des personnes ultra-expertes. Il s’agit tout d’abord de trouver les bénéfices tangibles de cette singularité et de les verbaliser. Puis de trouver comment  rendre cette singularité acceptable, sans faire peur.

Ferréole

Porter une thématique émergente nécessite également d’être hyper aligné sur soi-même, de croire à sa proposition.

Muriel

Effectivement, il faut être convaincu, être centré sur soi et ses convictions. Car on ne sait pas si cette communication fonctionnera. Elle nécessite de pouvoir tenir sur le long terme.

La part du public dans la communication d’innovation

Une communication moins user centric

Muriel

Il y a une sorte de paradoxe : alors que l’on a mis tellement de temps à faire acquérir des réflexes user centric, force est de constater que la prise en compte des besoins des publics joue un rôle moins central quand on communique sur des sujets d’avant-garde.

Bien sûr, l’émetteur doit rencontrer son public. Mais, comme le public ne sait pas à quoi s’attendre, ses attentes sont moins prises en compte. À travers sa célèbre formule ‘Moins de tests, plus de testicules’ Seguela reproche aux études et tests d’aboutir à des offres qui se ressemblent toutes, dans lesquelles tout est lissé. La communication sur des sujets émergents est forcément plus dans l’affirmation.

Répondre à la demande vs Innover

Muriel

Si on se centre uniquement sur les attentes exprimées par la demande, on n’invente pas grand-chose :
« Si j’avais demandé aux gens ce qu’ils voulaient, ils m’auraient répondu des chevaux plus rapides » disait Ford.
Il faut trouver le juste milieu entre l’invention pure/Offer Centric et  le User Centric.
Tout l’enjeu de l’innovation est là : inventer des choses qui répondent à des attentes sans que celles-ci n’aient été explicitement formulées.  Il faut essayer des formules, voir si elles sont comprises par les publics, évaluer l’accueil et adapter en mode “Test and learn”

Rassembler un noyau de départ

Muriel

Il y a souvent un noyau dur qui fait partie des convaincus de l’offre. Cette communauté de départ comprend les termes hyper pointus et novateurs.
Le noyau de départ est un cercle très fermé que l’on va élargir petit bout par petit bout, très progressivement. Il s’agit d’agir par petits cercles concentriques.
Tout dépend aussi des relations déjà existantes avec les publics.
Si l’on a déjà créé des liens forts, une communauté sera réceptive à un nouveau sujet émergent : c’est plus facile, car tu es déjà en lien avec elle. Ce qui est plus compliqué, c’est de sensibiliser un  nouveau public à ce sujet émergent.

L’extrême B2B pour faire adhérer

Véronique

Il s’agit effectivement de cibler uniquement les personnes utiles à l’innovation technologique.
Elles ont un certain degré de culture technologique pour en comprendre le bénéfice. Leur back-ground scientifique leur permet de comprendre qu’on ne vend pas des chimères ni d’avoir besoin de toucher le fondement scientifique de cette innovation, pour y croire.
C’est ce que j’appelle l’extrême B2B.
La communication de l’innovation peut être finement ajustée, car il s’agit d’une communication de niche entre pairs. Bien sûr, elle s’appuie sur les bons argumentaires, mais ils peuvent se permettre d’être très spécifiques, voire élitistes.

Communiquer par petits cercles concentriques

Véronique

Puis, le raisonnement se fait par cercles concentriques évoqués plus haut pour créer une acceptation.

  1. 1er cercle scientifique
  2. 2nd cercle technico économico scientifiques
  3. 3e cercle financiers technico économico scientifiques>

L’écho universel pour rassurer

Véronique

La singularité est telle qu’elle exige d’être compensée par un élément de réassurance, que j’appelle l’écho universel.
Le changement est tellement radical qu’il faut se projeter très loin pour comprendre l’importance des bénéfices et de l’impact.

Reprenons notre exemple de diagnostic sanguin :
Si la taille de l’outil de diagnostic est réduite de 10 fois, la fabrication est évidemment moins couteuse. Ces machines transportent le diagnostic facilement dans des zones isolées. Le diagnostic est délivré en 15 minutes (contre 24h à 48h pour un diagnostic normal). La thérapie pourra leur être administrée dans la foulée.
Toutes ces incroyables prouesses technologiques prennent sens au moment où l’on explique que ce nouvel outil de diagnostic permet de mieux soigner des publics éloignés du soin : drogués, migrants.
Un écho universel, c’est posséder un pourquoi qui dépasse tous les comment (pour paraphraser Nietzsche).
Contrairement à d’autres secteurs, la singularité d’une innovation deeptech repose sur la technologie et pas obligatoirement sur sa communication.
Si l’on prend l’exemple de la santé, lors de la création de l’identité visuelle de la start-up, il est préférable d’adopter les codes couleurs de la biotech ou medtech. Des couleurs froides – blanc,  bleu ou vert – qui traduisent l’extrême propreté, l’expertise.
Adopter les conventions du secteur permet d’avoir cet écho universel et d’être reconnu comme une partie prenante.

L’analyse du ressenti et le SEO à la rescousse de la communication d’innovation

Muriel

Les termes pointus qui définissent l’offre ne sont pas cherchés, forcément puisqu’ils ne sont pas connus. Néanmoins, les utiliser dans la communication est un passage obligé. Il faut le faire, mais aussi trouver des biais, des passerelles, des moyens de se raccrocher à d’autres termes connus.

Ferréole

Effectivement, quand le besoin est exprimé, analyser les recherches est une précieuse aide.
Pour cela, deux actions peuvent être menées, l’une concernant l’analyse de ressentis ou de perception, l’autre concernant le SEO.
L’analyse de ressentis permet de poursuivre cette exploration auprès des cercles précédemment cités pour faire émerger des idées encore jusque là inconscientes ou peu explicites et les mettre en mots.

Améliorer l’expérience client grâce à l’analyse de ressentis

Stéphane Labartino, COMONGO

 

Tester une nouvelle idée ou une thématique peut s’appuyer sur l’analyse des ressentis des personnes susceptibles d’être intéressées par ce que l’on propose.
Explorer le ressenti, le vécu, la perception de ces groupes de personnes permet d’apprendre de l’expérience des futurs ou potentiels utilisateurs et de recueillir de précieuses informations et des tendances.
Ensuite, par effet de miroir, c’est l’occasion d’aller plus loin et de valider, bousculer voire rectifier une hypothèse.
Puis, en y ajoutant de l’intelligence et de la créativité, de mettre en lumière des signaux faibles ou de créer une campagne de communication pertinente, intéressante pour les publics ciblés.
Attention à aborder cette analyse de ressentis avec humilité, sans certitude de la donnée qui sera recueillie.
Bien sûr, on n’est pas à l’abri qu’émerge une folle idée, qui demain changera totalement la donne et embarquera les foules ou que soit révélé un facteur de désirabilité.
Une belle aide pour structurer une proposition de valeur.

Le SEO pour étudier les données annexes

Alexandre Leblanc, maison Azincourt

 

Élaborer un contenu qui est fondamentalement nouveau s’appuie d’abord sur une démarche de co-construction avec son client. Par exemple, parmi l’une des tâches possibles, traduire son verbatim parfois très technique en langage compréhensible pour un humain lambda.

À cela vient s’ajouter une enquête très fine sur le sujet, laquelle consiste essentiellement à observer l’environnement pour déceler des sujets connexes auxquels on n’aurait pas pensé, et qui transparaissent tout de même au travers de certaines requêtes ; on va également recueillir des indices, des signaux faibles et passer tout cela au tamis. Dit autrement, à partir de nombreux jeux de données, on va essayer de déceler dans quelle(s) direction(s) peut souffler le vent.

Ensuite, Google, c’est le reflet statistique de la demande.

En d’autres termes, il s’intéresse aux besoins qui émergent du plus grand nombre, mais nous n’avons pas les éléments connexes, plus faibles en volume, et qui sont pourtant intéressants à exploiter.

Par conséquent, il est impératif d’approfondir l’analyse pour pouvoir identifier et collecter ces éléments.

Cette observation liminaire est corroborée avec des données annexes, par exemple une analyse du sentiment et du ressenti (via l’outil Comonimage édité par Comongo par exemple), l’étude du comportement sur le site web, ou encore, lorsque c’est possible, l’analyse des tendances de recherches ; tout ça est synthétisé dans une étude que j’appelle le « profilage d’audience », et qui permet entre autres de faire émerger des idées nouvelles.

Prenons un exemple : j’ai accompagné un fabricant de pâtes à repositionner leur communication, et lors de mon étude, j’ai observé des tendances de recherche évidente liées au pesage et à la cuisson des pâtes.
Toutefois, une observation attentive d’autres supports de communication, comme des forums, a fait remonter bon nombre de questions sur les pâtes pour les enfants : à partir de quel âge donner des pâtes, quelles recettes, quelle cuisson idéale pour les enfants ?
C’était une belle thématique émergente sur le sujet, et certaines interrogations n’étaient pas formalisées distinctement via de la requête sur le moteur de recherche.

Là-dessus, l’analyse du sentiment est un excellent complément pour affiner sa recherche et aller au fond du sujet.
Individuellement, les ressentis ne sont bien évidemment pas exploitables.
Additionnés, ils peuvent être d’une richesse incroyable, et permettent d’ouvrir des horizons parfois insoupçonnés.
Je vais reprendre un exemple : j’ai aidé une banque à formaliser un portail informationnel sur un produit bien précis, et celle-ci était persuadée que l’immense majorité de ses clients étaient satisfaits, études et chiffres à l’appui.
Pourtant, quand j’ai passé au crible leur ressenti à travers différentes typologies de contenus (blogs, forums, réseaux sociaux…), force était de constater que beaucoup avaient une certaine défiance à son égard. Et tout cela était très peu matérialisé sur Google avec des requêtes !

Aussi intéressante soit-elle, cette phase de recherche doit être pleine de ténacité, car elle demande de suivre des pistes qui ne se révéleront peut-être pas constructives finalement.

Mais parfois, on tombe sur quelque chose d’inattendu, comme tu le disais. Le fameux prince de Serendip.

La très bonne connaissance du sujet par le producteur de contenu est également requise, notamment pour s’imprégner de la situation.
Dans l’exemple que tu cites relatif à Continuum et à la pollution sonore, d’avoir vécu les bienfaits du silence est précieux pour le rédacteur qui peut se raccrocher à cette expérience et la partager.

Dans cet exemple, on tombe presque dans le contenu « d’expérience ». C’est là où les rédacteurs (à ce stade, je préfère même parler d’écrivain) peuvent libérer leur fibre littéraire, et jouer avec le style, les mots, les sonorités.
Le contenu ne peut se permettre d’enfoncer des portes ouvertes et se contenter de lieux communs.
Sur le web, on a un peu oublié que les mots peuvent provoquer des émotions, tout comme le son, les vidéos, les images.

C’est d’autant plus dommage que les gens passent beaucoup de temps à lire sur ce support.

Anticiper le contenu

D’autre part, lors de mon étude de profilage d’audience, j’ai pris l’habitude d’établir une moyenne des tendances de recherche pour un besoin donné. On aboutit ainsi à ce que j’ai appelé du « contenu prédictif » : anticiper pour mieux répondre aux besoins des utilisateurs.

Rien d’extraordinaire en soi, on revient à la base de toute stratégie éditoriale (et par extension marketing) : connaître sa cible pour mieux la servir.

Ce n’est pas forcément applicable pour tout – et parfois, je n’ai même aucune donnée – mais bien souvent, je suis capable de déterminer que telle typologie de produit, de service ou d’information est plus recherchée à tel mois de l’année qu’un ‘autre.

On peut voir ça comme un genre de « chirurgie du contenu ».

Je rattache donc des moments clés à des besoins.
Ce qui me permet de rationaliser ma production de contenus, d’anticiper l’ensemble des besoins de ma cible et d’y répondre en proposant le bon contenu au bon moment.
Ce qui rejoint également la sobriété éditoriale : on évite d’écrire à tour de bras pour meubler son blog bon gré, mal gré.

Puis, je délivre le contenu au moment T et le relaie ensuite ici et là pour chalander les utilisateurs.

La spécificité de la communication d’innovation

Place à la stratégie : inutile de multiplier les outils

Véronique

Pour résumer, à travers ta singularité, ton pourquoi, tu peux convaincre des partenaires pour dépasser les étapes de déploiement industriel et financier.
Puis, tu déclines une communication sur mesure en s’appuyant sur l’extrême B2B et  l’écho universel. Un subtil équilibre à trouver.
D’autant que ces entreprises à fort enjeu technologiques n’ont pas beaucoup de moyens et pas beaucoup de compétences.
Il s’agit aussi de travailler sur l’empowerment : donner aux chefs d’entreprise la capacité de piloter leur communication plutôt que de multiplier les supports.
Cette communication s’appuie sur 80% de stratégie pour 20% de déploiement opérationnel.
La stratégie est intimement liée au modèle économique et au calendrier de maturation de la technologie. C’est du sur mesure total.

Au lieu de proclamer, influencer son secteur

Muriel

Si un influenceur intervient sur le sujet, il s’agit d’évaluer quelle sera sa portée. Car s’il est très influent, mais uniquement dans sa niche, la portée sera moindre. La complexité est d’élargir.

Ferréole

L’objectif n’est pas faire de l’entre-soi pour se conforter dans sa zone de connaissance, ni de parler uniquement à ses pairs qui ont la même vision. Et en même temps, c’est précisément dans cette niche que l’on structure et que l’on construit l’offre, en tant que précurseurs.
Et il y a un jeu d’équilibre : il faut arriver à tisser des ponts entre cette offre hyper spécifique et la conscientisation de ce qu’elle apporte par un public plus large.

Muriel

Il est important de rapprocher des choses connues, de vulgariser. L’événementiel (conférences, webinaires) et le contenu vidéo sont des outils intéressants pour sensibiliser.

Véronique

Il y a ce mot désagréable « évangéliser » dans le milieu de la tech. Je ne l’aime pas, car il prend les gens pour des crédules qui croient à des légendes. Les arguments de chaque technologie sont décrits et réels. Pas de légende.
Le progrès n’existe pas non plus dans l’absolu, même si utilisées à bon escient, en prenant tout le contexte humain et environnemental, des technologies permettent de répondre aux nouveaux enjeux sociétaux.
Influencer son secteur commence par les experts. Puis il s’agit de comprendre le point de vue de l’acheteur et de décrypter pourquoi il serait tenté par cette nouvelle technologie qui remet pourtant en cause sa façon de fonctionner.
On peut prendre le point de vue miroir pour identifier son apport dans le contexte industriel dans lequel son innovation va se déployer.
Il s’agit de faire grandir cette innovation dans un environnement conservateur, petit à petit.

Influencer : la part du content marketing

Stéphane Truphème

Aujourd’hui, l’enjeu est de se positionner alors qu’il y a énormément de bruit, sur les réseaux et internet.
Mon conseil est d’effectuer une analyse fine de l’audience – ici notre noyau de départ – et de sa préoccupation. Faire émerger sa singularité, se concentrer sur un persona et s’adresser à ce public de niche.
Plus le point de douleur chez le persona visé sera “irritant”, plus les audiences seront en quête de solutions. Ainsi, la clé est de se focaliser sur ses personas et de resserrer le champ sur des “irritants” très précis.
En apportant des solutions à des problématiques pointues, tu construis une audience fidèle qui vient chercher des informations précises sur les sujets qui l’intéressent.
Plus tu vas toucher ton cœur de cible, plus tu auras une résonance. Alors l’audience participe en partageant les contenus et en les commentant.
C’est une manière intelligente de se distinguer de la concurrence.

Comprendre le branded keyword

Stéphane Truphème, Captain Marketing

Commençons par un exemple.

Aujourd’hui, le terme Inbound marketing désigne une méthodologie utilisée par tous les marketeurs.
Bien que le mot appartienne désormais au langage courant, il reste toujours associé à Hubspot. En effet, c’est cette entreprise qui a inventé et promu le terme.
Aujourd’hui, “Inbound Marketing” représente un volume de plus de 12 000 recherches mensuelles moyennes en France. Ce chiffre atteste bien évidemment de son adoption.

Les ingrédients d’un bon branded keyword

Stéphane Truphème

Le branded keyword doit être :

  • facilement appropriable

Si l’audience comprend facilement le concept véhiculé par le mot-clé “brandé”, et qu’il est suffisamment simple à mémoriser, elle va se l’approprier et l’utiliser. C’est pour elle un moyen simple d’exprimer l’univers évoqué.
Nous utilisons par exemple le terme “Inbound Marketing” pour décrire la méthodologie associée. Il est bien évidemment plus simple d’utiliser le branded keyword plutôt que de décrire la méthodologie.

  • représenter un concept, un univers

Pour que l’audience visée puisse aisément se l’approprier, le branded keyword doit véhiculer ou représenter un contexte ou une notion particulière. Il doit être facilement compréhensible et suffisamment représentatif du contexte associé.
À titre d’exemple, avec les “contenus prétextes” que je propose, la notion est assez facilement associée à des contenus de faible qualité qui n’ont que pour intérêt d’être visibles sur les médias sociaux ou Google. Mais en utilisant ce type de contenu, on ne fait que créer du “bruit” et “polluer” Internet plus qu’apporter de la valeur à ses audiences.
Le branded keyword “contenus prétextes” permet facilement de véhiculer cette idée.
Le concept de « sobriété éditoriale » que tu proposes est un excellent exemple de branded keyword. Il est facile de comprendre le concept qui se cache derrière ton expression et il est facilement mémorisable.


Un article écrit par Ferréole Lespinasse

Au sein de Cyclop Éditorial, Ferréole accompagne la redirection de la communication à travers l’approche par la sobriété éditoriale : conseil, audit de site, rédaction et formations, conférences et sensibilisation en sobriété éditoriale, rédaction web, langage clair.

Ensemble, recentrons la communication sur l’utile et l’essentiel. Réinventons les règles.