
Design thinking + design éditorial = vers une empathie éditoriale ?
30 mai 2016À la une, Communication raisonnéeComment éprouver la stratégie éditoriale au regard des disciplines connexes au webmarketing ? Thomas Guillermou nous a présenté l’UX Design. J’en ai alors tiré le design éditorial : un contenu qui propose une expérience basée sur l’émotion.
Pour aller plus loin dans le design éditorial, Laurent Pouchoy nous parle de la manière dont il utilise des personae en s’appuyant sur les méthodes du design thinking.
Le design éditorial
En rédaction web, en deçà des problématiques de référencement, ce qui prime à mon sens est la notion d’écriture de communication, une écriture efficace.
Le contenu rédactionnel est là pour accompagner l’internaute dans une action, pas pour le gaver d’information. L’efficacité est une notion primordiale. Le texte doit être épuré et adapté à l’expérience de l’utilisateur.
Lors des transactions telles que passer une commande, remplir un formulaire, mais aussi s’abonner, etc., l’utilisateur a besoin d’être entouré, que les actions (téléchargement, abonnement à une newsletter, inscription) qu’il a effectuées soient confirmées.
Et bien, c’est à ce moment-là qu’intervient le design éditorial. La question n’est pas seulement de s’interroger sur le ton qu’on va employer, mais sur le scénario de l’ensemble de l’action : par exemple après un abonnement, envoi d’un email avec un texte travaillé ; ou en confirmation d’une action, apparition d’une fenêtre contextuelle avec un texte au contenu soigné.
(J’avais déjà souligné l’importance de ces micros-contenus souvent négligés, qui sont partie primordiale du métier du rédacteur web)
Les personae au service du design éditorial
Comment travailler ces contenus transactionnels pour insuffler une émotion ?
Une technique utilisée en marketing sont les personae. Il s’agit de dresser une représentation fictive de son client pour lui parler à l’oreille, s’adresser à lui avec son niveau de maturité, dans sa relation avec la structure.
Laurent Pouchoy nous explique comment il travaille en design thinking l’empathie des personae pour aller plus loin dans la compréhension de ses besoins.
Laurent, peux-tu nous expliquer comment tu envisages les personae ?
Avant de rencontrer et d’interviewer mes différents publics, je façonne des personae pour être sûr de bien comprendre leurs besoins. L’objectif : travailler la mécanique d’empathie.
J’utilise les personae avec une dimension émotionnelle plus marquée que dans le profilage marketing. Il s’agit, en voulant comprendre le parcours utilisateur, d’inscrire le persona dans une démarche d’exploration.
De mon point de vue, l’intérêt du persona est double. Il permet de
- s’assurer d’un niveau d’empathie suffisant avant de rencontrer ses publics
- mieux définir la trame de l’interview : qu’est ce que je vais dire, comment vais-je le dire, dans quel cadre ?
Le persona me permet de mieux préparer la rencontre avec l’humain, en définissant qui est la personne d’un point de vue factuel et émotionnel. Attention, le persona a ses limites, ce n’est pas un humain. En revanche, il garantit le niveau d’empathie minimum.
Ensuite, je peux commencer à explorer, analyser l’expérience de ce persona. J’atteins un niveau d’empathie suffisant pour me poser les bonnes questions, identifier des zones dans lesquelles je suspecte qu’il se passe des choses, desquelles pourrait émerger du sens. Je peux alors créer de la discussion, laisser dériver l’interview dans ces zones-là.
Comment crées-tu tes persona ?
Le persona doit dégager de l’émotion et non de la dérision. S’il me fait sourire, je me rapproche. S’il me fait rire, je m’en écarte. Il me fait sourire si je me reconnais ou je reconnais des proches.
Il faut pouvoir « être à sa place » d’un point de vue émotionnel. Je décris un persona comme dans un roman. Prenons l’introduction du film Amélie Poulain. Elle dit qui elle est, puis « j’aime », « j’aime pas ». Elle décrit ses sensations : « j’aime prendre dans ma main du riz, puis le laisser couler ».
« Le père d’Amélie, ancien médecin militaire, travaille aux établissements thermaux d’Enghien les Bains. Raphaël Poulain n’aime pas:
- pisser à côté de quelqu’un.
- Il n’aime pas surprendre sur ses sandales un regard de dédain.
- sortir de l’eau et sentir coller son maillot de bain.
Raphaël Poulain aime :
- arracher de grands morceaux de papier peint.
- aligner toutes ses chaussures et les cirer avec soin.
- vider sa boîte à outils, bien la nettoyer et tout ranger, enfin. »
Ensuite, je projette ce persona dans l’expérience en tant qu’usager. Je vois tout de suite si mon travail est superficiel, le persona est mauvais.
S’il m’amène d’autres questions : « je pense qu’il aime ça, mais aime-t-il vraiment cela ? », alors j’ai créé un niveau d’empathie suffisant pour avancer. L’objectif, c’est de s’attacher au personnage pour ressentir de la compassion, me mettre à leur place.
En analysant l’expérience utilisateur, au travers d’un persona, je me demande comment « Matthieu » réagirait dans telle situation. C’est pour cela que le choix de la photo est très important. Le persona n’est pas n’importe qui.
Le travail de l’expérience utilisateur permet de lever des points sur lesquels réfléchir, qui vont servir la manière dont je vais gérer l’interview.
En situation réelle, je me représenterai le persona comme un mix de Paul et Matthieu.
Bonus : téléchargez la carte d’empathie mise au point par Pampa
Merci Laurent pour ton éclairage qui donne une manière nouvelle d’aborder le persona.
En allant plus loin, il est plus aisé de mieux comprendre, ressentir ses besoins de ses publics … et de leur délivrer le contenu adapté. Ainsi que d’encadrer l’expérience et sa navigation avec un design éditorial bien pensé.
Laurent Pouchoy
Laurent a fondé et dirige la société Pampa une agence d’innovation par les usages.
Son métier : accompagner ses clients dans l’innovation pour augmenter la valeur d’usage de l’offre
Sa force : créer les conditions pour que ses clients puissent penser et concevoir des offres de produits et de services innovants, dans les meilleures conditions.
Ses objectifs :
+ Permettre à l’innovation d’être constante et porteuse de sens
+ Permettre à l’entreprise de devenir apprenante sur son marché
Sa méthode : faire gagner en autonomie ses clients en mettant en place un environnement sécurisé, faire comprendre ses propres freins et incarner une posture qui a du sens.
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